Les gouttes de Dieu : une lecture géographique d'un manga "vinicole"
Une note interessante trouvé sur le site du CERVIN, sans nom d'auteur, malheureusement.
Résumé
Les géographes s'intéressent principalement à l'espace qu'il soit réel ou imaginaire. Ils ont différentes méthodologies d'analyse. Pour cet article, il s'agit d'interpréter des espaces à travers une œuvre littéraire : un manga. Ce dernier, Les Gouttes de Dieu, est un grand succès en France, certainement parce qu'il met en scène des protagonistes dans l'univers du vin. Et c'est en cela que les géographes peuvent être intéressés par ce manga. Il s'agit de lire cette BD à partir d'un regard spatialisant. L'action des héros forment des territoires du vin dans la mégalopole nippone. Les Gouttes de Dieu servent de support de lecture géographique afin de comparer ce qui est plausible et ce qui ne l'est pas. Cet article propose un regard sur des grands thèmes de géographie et plus largement de sciences sociales comme le terroir, la proximité, l'action et les systèmes d'acteurs.
Mots clé : espaces du vin, manga, terroir, acteur, proximité
Le vin et le Japon forme un couple qui reste d'actualité (Pitte, 2009). Même si le saké est toujours le vin « officiel » au pays du Soleil Levant, le vin tient une place à part dans la culture nippone, aussi bien au niveau scientifique (cf par exemple le colloque « Modes et Mondes du Boire : vin et saké dans la mondialisation », 6 et 7 novembre 2005) qu'au niveau populaire. Pour preuve, il suffit de lire le manga Les Gouttes de Dieu, écrit par Tadashi AGI et dessiné par Shu OKIMOTO. Cet œuvre découpée en 20 tomes, traduite en plusieurs langues dont le français, se déroule au centre de la culture bachique japonaise. Il ne s'agit pas d'un récit sur les habitudes de consommation des Japonais, encore moins de leur production mais de leur appréhension au vin par rapport à leurs codes et valeurs. Ce livre apporte beaucoup à la vulgarisation de la culture vinicole, aussi bien pour les lecteurs passionnés que pour un public plus néophyte. Les huit premières tomes publiées en français offrent un éclairage fulgurant sur la compréhension des vins dans toute leur complexité.
Tadashi AGI est le pseudonyme d'un écrivain, ou plutôt d'un couple d'écrivains composé d'un frère et d'une sœur, très connu dans l'univers des manga pour adultes. Longtemps fasciné par les enquêtes policières, il essaye de reproduire le style d'Agatha Christie en manga. Shin KIBAYASHI, le frère du duo, a étudié les sciences économiques à l'université. Il s'éprend, cependant, très vite pour l'écriture à suspens (Psychometrer entre autre). Sa passion pour le vin va l'amener à réaliser une histoire autour de cette boisson. Il entraîne dans l'aventure Shu OKIMOTO, une dessinatrice qui n'avait pas l'habitude de croquer l'univers du vin, ce qui lui permet de se lancer dans cette entreprise sans préjugé. Elle va donc s'investir et se documenter. Cette ignorance va lui être une force et elle retrace ce monde du vin avec précision et efficacité. Cette union donne un concentré de lucidité sur l'environnement vinicole. L'histoire est originale. Le fils d'un œnologue mondialement réputé découvre le testament de son père. Ce dernier lui apprend qu'il doit retrouver douze grands crus appelé les douze apôtres. Le problème principal réside dans le fait que Shizuku (le héros – fils de l'œnologue) ne s'est jamais intéressé au vin. Alors pourquoi chercher ces apôtres ? Uniquement pour relever le défi. Cette histoire qui va bien évidemment évoluer au fur et à mesure des pages entraîne le lecture dans le labyrinthe du vin, en même temps que Shizuku. Le vin lui apprend la « vie ». Jusque là, rien de bien original. Et surtout, en quoi ce livre apporte à la géographie ? Pour répondre à cette question, il faut se plonger dans les milliers de pages. Effectivement, tout au long de ce récit, le lecteur apprend sans cesse sur le vin, aussi bien au niveau de la production que de la consommation. Le vin devient, alors, un véritable fils d'Ariane. Les auteurs et dessinateur livrent là un exercice périlleux qui décrypte les nœuds du monde du vin.
Pour essayer de comprendre l'intérêt que les géographes peuvent trouver dans ce manga, il convient de disséquer les grandes thématiques reprises tout au long des tomes de cette BD. Tout d'abord, une lecture du terroir peut être faite. Certes, il s'agit là d'un terroir magnifié par les auteurs. Mais l'intérêt réside dans une lecture complexe du terroir, où les indicateurs physiques se trouvent en concurrence avec les facteurs culturels et sociaux. Puis, le géographe est interloqué par la connaissance du monde du vin, à proprement parlé. Effectivement, l'univers général du vin est largement décrit (de Parker à la différence d'appréciation entre vin cher et vin bon marché, en passant par les antagonismes entre les différentes régions productrices), mais l'infini complexité est aussi révélée (les variations entre chaque unité de production, les méthodes différentes...). Enfin, Les Gouttes de Dieu met en avant les relations de la proximité des aficionados du vin. Le monde du vin est vu comme un microcosme où tous les acteurs semblent se connaître.
I) Le terroir, de l'objet physique à l'objet culturel
Le terroir est un objet peu consensuel pour les géographes ruralistes. Pour certains, il est décrit depuis longtemps comme une entité physique (Enjalbert, 1983, Pijassou, 1980). Parallèlement, il est devenu un objet de géographie sociale qui le place comme un construit humain. « Le terroir géographique est tout à la fois un objet socioculturel, un espace physique mais aussi un « outil d’organisation de la connaissance. Mieux encore, le terroir n’est pas seulement une notion, laquelle permet d’organiser le contenu, mais un concept, qui pour sa part, permet d’organiser le connaître…Le géographe doit inventer sans cesse des terroirs pour se représenter plus commodément l’espace, conformément à la problématique qu’il a choisie » . Alors le terroir devient un instrument de la production d’objets spatiaux, « un subtil instrument d’analyse géographique » ». Pour les auteurs des Gouttes de Dieu, le terroir est aussi bien un espace purement biophysique qu'un espace d'appropriation, de construction sociale.
A) Le terroir, un bout d'espace
Au fur et à mesure des pages de cette œuvre, le lieu de production des vignes, autrement dit le vignoble, prend une dimension complexe. Tadashi Agi essaye de montrer que les vignes s'imprègnent des qualités des sols. Il conçoit alors le terroir comme une alliance entre le sol et le climat, la biosphère et la lithosphère... Il expose cette vision essentiellement lorsqu'il parle des vins de Bourgogne, largement liés à un terroir dans une lecture géographique héritée (Pitte, 2005). Il s'inscrit alors dans une explication déterministe, classique dans le domaine des vins. Dès le premier tome, Shizuku, le héros jeune novice de la dégustation, apprend par une amie apprentie œnologue et son futur professeur en dégustation que ce qui donne le caractère d'un vin s'appelle un terroir. Ce dernier est défini comme l'ensemble de « l'environnement du raisin dans le vignoble, la qualité de la terre, l'ensoleillement, le drainage » (T.1, p.200). L'arôme du vin viendrait en partie de ces alliances dites naturelles. Toutefois, l'auteur distingue bien la parcelle, la commune, l'appellation du terroir. L'une ou l'autre peut éventuellement représenter un seul terroir mais elles peuvent aussi être formées par plusieurs terroirs. Dans le deuxième tome, Agi livre d'autres composantes du terroir au sens physique, comme par exemple l'enherbement des espaces intercalaires. Il égraine petit à petit des éléments pouvant être considérés comme des facteurs constitutifs du terroir physique.
La terre du terroir est chargée de morale dans les pages proposées par les auteurs. En effet, le terroir physique est appréhendé comme avatar du bien être, comme une matrice nourricière. « Ce vin est l'Angelus de Millet, comme ce tableau qui décrit la silencieuse prière pour les bienfaits de la terre... ce vin exprime un appel au terroir. » (T2. p.102). De plus, cette mise en perspective morale s'accompagne d'une idéalisation du vin par rapport à la religion. Certes, le vin est souvent associé à la religion dans la littérature européenne. Une certaine histoire ancrée dans la culture religieuse a fait du vin un objet métaphysique chez nombre d'auteurs et de textes (Bible, Pline Le Jeune, Villon, Rabelais, Rousseau, Sand... mais aussi chez les auteurs orientaux comme le poète Omar Khayyan, Mowaffak de Nishapur, ou plus récemment Jala Ud Dim Rumi entre autres). Cette vision religieuse est revisitée par Tadashi Agi. En effet, il fait de Issei Tomine, le concurrent de Shizuku pour trouver les apôtres de Dieu, un mystique inspiré par le retranchement dans un temple bouddhiste (T5). Les références par rapport aux éléments naturels (eau, air, terre) sont sous-jacentes à cette démarche. La nature devient un élément du terroir.
Les éléments naturels peuvent prendre une dimension plus pragmatique, plus concrète. Lorsque Shizuku et ses compagnons (ses collègues, son chef, ses amis) se lancent dans la découverte des produits du Chablisien, l'appel aux caractéristiques physiques sont largement mis en avant (T3). C'est le goût minéral des vins de Chablis qui sont avant tout montrés. Pour accompagner des huîtres, le jeune protagoniste cherche un vin parfait pour éviter l'arrière goût que laisse ce coquillage sur le vin blanc. Les Meursault sont abandonnés au profit d'un Chablis village. Les auteurs montrent que c'est le côté minéral de ce vin qui permet l'union idéale. Pour eux, cela s'explique essentiellement par la structure pédologique. Le sol de cette commune est calcaire, formé par des sédiments de plancton et de coquillages fossilisés (T3, p. 110-111). Le raisin issu de ces sols fossiles s'accapare l'arôme des huitres présentes dans le sol. Une fois de plus, le terroir est l'antre du naturel.
Il faut tout de même nuancer cette vision. Les auteurs connaissent une fascination pour les échanges qui peuvent exister entre le sol et le raisin. Les références sont nombreuses dans tous les tomes. Cependant, ce manga souligne également tous les aspects sociaux et culturels du terroir. La valorisation du vin par le terroir (qui justifie le prix de la bouteille selon les lois du marché) se fait grâce à l'alliance des « natures » (naturelle et naturalisante) du terroir. Les hommes jouent pleinement un rôle dans la constitution des terroirs. « Quand le ciel, la terre et les hommes arrivent miraculeusement à s'allier pour le meilleur, tout le potentiel du terroir supérieur peut se développer » (T3, p. 141). Le terroir est donc plus qu'un simple morceau de terre en interaction avec des éléments purement naturels. Il est aussi humain.
B) Le terroir, un bout de territoire
« Les terroirs viticoles sont des espaces structurés par une action organisée et donc par un ou plusieurs groupes sociaux, afin de gérer, dans la durée la fragmentation et les hiérarchies sans en mettre en péril le fragile équilibre » . Le terroir est un territoire puisqu'il se construit par l'appropriation collective et individuelle. Cette vision se retrouve au travers des différents tomes. Les auteurs rappellent en permanence que le vin naît avant tout de l'alliance du savoir-faire et de la technique. Le millésime reflète ce mariage. Les exemples qui illustrent ces conceptions du terroir sont nombreux dans cette bande dessinée. Seuls deux seront retenus : la description d'un apôtre et le cas du Chambolle-Musigny.
Ce dernier est un vin de Bourgogne se situant au centre des Côtes-de-Nuits, allant de Morey-Saint-Denis et Vougeot (T5). Cette appellation est découpée en plusieurs « terroirs », certes liés au sol mais principalement à la méthode de vinification. À l'extrême nord, les vins produits sont des Bonnes-Mares, considérés comme des vins d'exception. La structure pédologique est principalement composée d'argiles. À l'est et au sud, les sols plus calcaires et sableux accueillent des vignes pour des vins qualifiés de plus « Chambolle », à savoir plus légers, plus aériens. Mais il est possible de retrouver des arômes de Bonnes-Mares dans les Musigny (sud de l'appellation). En effet, certains producteurs vinifient dans les deux sous-appellations et la technique, le savoir-faire jouent un rôle plus important que les sols. Il s'agît bien d'action humaine et non pas uniquement naturelle. Les protagonistes se demandent alors si les vins recherchés doivent être trouvés sur des critères physiques ou techniques. La réponse se trouve dans l'union des caractéristiques naturelles, celles du producteur et celles du millésime. Voilà à quoi se résume le terroir, du moins dans les pages de ce manga. Cette vision n'est pas fausse comme l'ont montré nombre de géographes (Roudié, 1994, Hinewinkel 2004a, Pitte, 2006).
Une autre définition du terroir est abordé dans cette œuvre. Il s'agit d'une dimension plus géopoétique (Brunet, 1993 ). Le terroir se traduit par une description emphatique. La dégustation du vin permet d'élaborer un terroir imaginaire, celui naît des sensations ressenties lors de la réaction chimique qui se produit lorsque le vin enrobe l'air en bouche. Le dégustateur va alors percevoir des éléments particuliers qui sont aussi bien des arômes qui existent dans la composition du vin que des arômes pensés, liés aux impressions organoleptiques. La description de chaque « apôtre » correspond à un terroir sensoriel. Prenons l'exemple du deuxième apôtre. Ce terroir s'assimile tout d'abord à un paysage, celui d'une colline près de Florence (Je roulais en voiture sur la route qui mène de Florence à Pise. [...] Une fois descendu de voiture, après avoir passé une rangée de maisons aux jardins plantés d'oliviers centenaires et des vignobles aux raisins mûres, je me dirigeai vers le centre du village, je grimpais lentement. T7). Il est aussi une histoire. L'auteur fait allusion à l'Antiquité Romaine et à la Renaissance. Le vin est décrit également avec des éléments culturels. Le deuxième apôtre s'identifie à deux tableaux représentants Mona Lisa, une en été, une au printemps. Un autre facteur intervient, celui du plaisir. Le père de Shizuku demande explicitement dans son testament quel tableau préfère-t-il. Bien évidemment, cette description peut être lue comme une simple analyse œnologique. Toutefois, elle peut s'interpréter comme une lecture du terroir culturel ; un terroir rêvé qui mélange aussi bien réalité socio-spatiale (forêt pour le premier apôtre, village perché pour le deuxième...) qu'imagination dégustatrice (fraîcheur, velours, fruits, etc.).
Les auteurs ne se contentent pas d'évoquer les terroirs. Ils parlent du vin comme un élément fédérateur, comme un lien entre les individus. Pour convaincre le lecteur, ils décident d'aborder le monde du vin par sa complexité. Une conception du monde du vin proche de notre analyse des espaces du vins dans le Sud-ouest de la France (Boivin, 2008).
II) Le monde du vin et ses acteurs
Cette histoire retrace des phénomènes assez complexes qui apparaîtssent dans le monde du vin. Ce dernier peut sembler uni aux premiers abords. En fait, il n'en est rien. Des jeux de pouvoir très intenses existent au sein de la communauté du vin. Mais le pouvoir de chaque acteur n'est pas issu uniquement du pouvoir que les institutions leur donnent. Le vin, en cela devient une ressource territoriale transcendante (Crevoisier, 2008), c’est-à-dire qu’il est à considérer dans l’ensemble de son identité et non pas par rapport à une seule de ses caractéristiques. Par exemple, le vin ne peut se limiter à son prix. Il est soutenu par un dispositif de préjugés, de valeurs et de confiance. Il est donc envisageable d'observer les territoires du vin par le prisme de l'influence et des trajectoires de vie, deux critères relatifs à une approche actorielle.
A) Les espaces du vin sous influence
Les sept premiers tomes se réfèrent majoritairement à l'avis d'une icône du monde vinicole : Robert Parker. Pourquoi ? Objectivement, Robert Parker a fait la pluie et le beau temps pendant au moins une décennie (aux alentours de 1994 jusqu'à 2006 environ). Il est critique, mondialement reconnu et il sort son guide régulièrement (Agostini, 2007). Il a un système de notation sur 100. Lorsque la note dépasse les 95, le vin en question peut se vendre à plus d'une centaine d'euro. Comme le film Mondovino a tenté de montrer, R. Parker ne convainc pas tous les professionnels de ce monde. Toutefois, il est incontournable même si son jugement influence un peu moins le marché vinicole. Les héros de cette histoire se réfèrent régulièrement aux notes données par ce journaliste-critique.
Cet engouement pour les notes de Parker reflète assez bien une réalité observé lors des enquêtes auprès des producteurs dans le Sud-ouest de la France. Plusieurs d'entre eux qui estimaient avoir la chance d'apparaître dans le guide n'oubliaient jamais de le faire savoir lors de l'interview, précisant la note que leurs vins obtenaient et certains allaient jusqu'à ouvrir le guide exposé dans leur chais, comme une preuve irréfutable de la qualité de leurs produits.
Miyabi, étudiante en œnologie, partenaire de shizuku dans la recherche des apôtres, utilise très souvent des références notées de Parker Junior. Il lui arrive de ne pas comprendre pourquoi un vin qu'elle juge difficile d'approche ait une bonne note dans le fameux guide. Shizuku tente alors de lui expliquer que la dégustation de vin est très liée au contexte, en particulier aux conditions d'ouverture du vin, à l'encarafement ou non et aussi aux susceptibilités du dégustateur. C'est pour cela que les avis divergent et que le commentaire d'un critique n'est pas obligatoirement la sacro-sainte parole. Toutefois, Miyabi continue à y faire référence. Cette position a été observée auprès des acteurs rencontrés. Certains ne veulent pas faire de vin « à la parker » et pourtant ils y font référence en permanence puisqu'ils disent qu'ils ne veulent pas faire des vins tanniques, boisés et vanillés (les trois critères qui sont les préférés du dégustateur Parker). Ils comparent donc en permanence et sans l'avouer regrettent de ne pas figurer dans le guide.
Enfin, Les Gouttes de Dieu évoquent très bien l'ambiguïté des choix des vins par rapport aux critiques vinicoles. Les frères jumeaux Ishikawa tiennent une boutique de vin. Ce magasin, d'un seul bloc morphologique, est séparé en deux. D'un côté des vins bas de gamme, accessibles au plus grand nombre, de l'autre côté, des vins plus chers, plus élitistes. Cette division, symbolisée par un rideau, s'explique par le choix de chacun de deux frères. En effet, le premier pense qu'il est préférable de vendre du vin bon marché à un public nombreux qui souhaite avant tout boire du vin. Le deuxième veut vendre du vin « digne de ce nom », c'est-à-dire du vin pour connaisseur. Derrière cette division, une autre est visible. En effet, le frère qui vend des vins bas de gamme accuse son jumeau de ne solliciter que des vins bien notés par Parker. Il lui répète à plusieurs reprises (T.3, T.4 et T.5). Un autre personnage est très influencé par les notes de Parker, Issei Tomine. Cet œnologue fait confiance aux vins choisis par le critique américain. Il s'avère alors qu'il existe une mode dans les choix des vins, une mode dictée par certains leaders, notamment au niveau de la dégustation qui est un chaînon important du circuit de vente du vin dans le monde entier. Mais les critiques ne sont pas les seuls acteurs importants du monde du vin. Il y a aussi les producteurs, les faiseurs de vin.
B) Une histoire d'hommes ?
L'histoire de ce manga invite les lecteurs à découvrir de véritables figures du monde de la production. Pour les auteurs, un vin est avant tout une marque de fabrique d'un individu qui a une histoire, un savoir-faire. Cette philosophie reflète assez bien le monde du vin que nous pouvons observer sur le terrain.
Nous prendrons deux exemples emblématiques que les auteurs ont décidé de mettre en avant. Tout d'abord, Henry Jayet, éminent producteur de Gros Parantoux, en Bourgogne. Les personnages nous présentent ce viticulteur comme un « monstre sacré » du vin (T1 et T2). Il est encensé, il devient un véritable modèle pour les auteurs. Ses vins sont difficilement remplaçables, y compris par d'autres producteurs qu'il a formé ou ses parents proches. Sa griffe est inimitable, à en croire les héros du livre. Un de ses neveux, malade en 1999, ne put vinifier son vin. Henry Jayet décida donc de lui donner un coup de main et vinifia sa récolte. Les amateurs de vin de Jayet retrouvent dans ce vin d'Emmanuel Rouget les techniques du premier. En Bourgogne, Jayet est considéré comme le Pape de cette région viticole. Il joue un rôle primordial dans la réputation des grands crus bourguignons. Le vin est une histoire d'hommes.
Les Gouttes de Dieu est parsemé d'illustres noms tout au long des pages. D'autres viticulteurs mondialement connus sont cités comme étant des leaders des vignobles. Jacques-Frédéric Mugnier en est un autre exemple. Issu d'une lignée de viticulteurs ou de producteurs de liqueur, ce viticulteur est une figure du vignoble de Chambolle. Très tôt, l'exploitation de Mugnier va s'orienter vers une viticulture raisonnée, évitant ainsi la trop grande utilisation de produits chimiques. Ces vins sont reconnaissables par les amateurs. Il diffère des autres Chambolles par ses qualités gustatives. Son fil, Frédéric, a repris ses techniques et ses vins sont très proches de ceux de son père. Il existe donc une signature des vins, ce sont les hommes. Chaque vin est différent car derrière cette boisson, un travail d'homme est caché. C'est le message que les auteurs ont choisi de faire passer.
Mais pourquoi choisir ces hommes parmi les milliers de viticulteurs que la France compte ? Les auteurs mettent en avant principalement des viticulteurs de renom, mais pas uniquement. En fait, le choix est fait par rapport aux rencontres qu'ils ont fait lors de leur voyage exploratoire. Ils n'ont pas rencontré directement toutes les personnes citées, mais retranscrivent les parcours dont ils ont entendu parlé par les viticulteurs rencontrés. Ils essaient de faire renaître les trajectoires individuelles qui se cachent derrière le vin. Les auteurs ne se contentent pas d'en faire des « personnages » de leur histoire, ils leur donnent la parole au début de chaque tome. Cependant, les ouvertures ne sont pas uniquement faîtes par des viticulteurs, elles peuvent être écrites aussi par des sommeliers, exportateurs, commerciaux, tout un panel de « ceux qui font le vin » au sens général. Mais finalement, si tous les acteurs évoluent dans un même monde, n'existe-t-il pas un microcosme vitivinicole ?
III) Le monde du vin, un microcosme
Un monde tourné sur lui même ressemble fortement à un microcosme. Mais en réalité, qu'est-ce qu'un microcosme ? Est-ce uniquement un lieu d'enfermement géographique ? Ce terme peu utilisé en géographie mérite une définition. Pour essayer de cadrer un peu plus cette notion, il convient d'ouvrir un dictionnaire classique. D'après le Larousse Universel, un microcosme apparaît comme « une image réduite du monde, de la société »... « synonyme de micro-société ». Pour le portail encyclopédique du Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales (CNRS), il s'apparente à un « monde en réduction, entité, ensemble formant une unité ». Pour les géographes (qui ont très peu étudié ce terme), le microcosme est également un monde centré sur lui-même, un espace de contiguïté. Le microcosme trouve un début d'existence dans une valeur sociale liée à un lieu : le repli communautaire. Il est l'antre d'un monde autocentré, où les acteurs se connaissent tous, où les stratégies ressemblent plus à des consultations qu'à des confrontations. Un mini-monde implanté dans un monde plus vaste.
A) Le monde du vin sous l'emprise de la proximité
La proximité, élément purement géographique et temporel s'avère être une clé de lecture du local inséré dans le global. En effet, la sensation d'être voisin donne du corps à la co-présence en la transformant en proximité. Cette dernière s'étend sur les espaces proches du noyau de diffusion et prend de l'ampleur grâce à un système réticulaire de connaissances individuelles (Goffman, 1973). Les interactions au sein d'un petit espace favorisent la création d'une entité identitaire forte. La proximité joue la carte de la confiance envers les individus qui partagent les mêmes lieux.
La notion de proximité n'est jamais définie chez les géographes (37 dictionnaires de géographie, d'aménagement ou de géopolitique ont été consultés à l'Institut de Géographie à Paris et aucun d'entre eux ne soumettent une définition de cette notion). Les économistes, principalement les économistes spatiaux et les économistes régionaux, utilisent cette notion et en font même un facteur explicatif des phénomènes économiques et sociaux (Torre, 2008). Pour l’économie spatiale, la proximité est liée au territoire. Elle est de plusieurs registres d’après ce courant de pensées. Tout d’abord, elle est ancrée dans une histoire locale. Les relations de proximités apparaissent comme une finalité des capacités à créer ou non un espace compétitif. Elle est aussi fonctionnaliste, c’est-à-dire qu’elle permet de délimiter un territoire, d’en donner son contour grâce à la matérialisation des réseaux. Puis, la proximité a des ancrages institutionnels qui apparaît comme le cadre des projets et de leur réalisation. La proximité peut être étudiée sans le cadre territorial d'après Rallet (Rallet, 2002), elle devient donc un système de coordination. Cette lecture revient finalement à l’analyse des agents économiques sur un espace (et non plus un territoire économique). La proximité comme coordination se contente du fonctionnalisme. Elle n’est plus du domaine du complexe, le territoire n’est pas utile pour les fonctionnalistes. Pour l’économie, et surtout, l’économie géographique, la proximité servait essentiellement dans les analyses des coûts de transport. L’espace est donc une « friction ». Mais la réalité de la proximité est bien plus complexe que cela. Il faut prendre en considération tous les facteurs économiques et sociaux, autrement dit faire intervenir une coordination actorielle ; une mise en place d’une gouvernance (Rallet, 2002).
Dans les Gouttes de Dieu, la proximité occupe une place importante. Deux proximités sont observables (Torre, Caron, 2005). Tout d’abord, la proximité géographique. Elle existe entre plusieurs objets. Elle se matérialise par la distance métrique. Elle est relative par rapport aux moyens mis à disposition pour réduire la distance (transport, temps…). Elle est donc subjective et dépend des représentations des individus. En revanche, la proximité organisée est liée à la capacité des institutions ou des groupes à créer des barrières plus ou moins franches entre les individus et les groupes. Ces deux proximités se retrouvent tout au long des pages de l'histoire. En effet, les protagonistes cohabitent dans la même ville, la mégalopole nippone. Certes, l'histoire oblige les auteurs à réunir les personnages dans un même espace pour faciliter les communications directes. Ce rapprochement métrique (plutôt que géographique) est voulu aussi pour amplifier l'effet du lieu, l'effet des intérêts de chaque héros. Il existe un microcosme autour du vin au Japon au même titre que dans d'autres ville phare pour la dégustation de vin comme par exemple à Luxembourg Ville (Reckinger Rachel, 2008), Bordeaux, Londres, New York (Johnson, 2006). Les lieux fréquentés par les jeunes « enquêteurs » s'assimilent à ceux des plus grands collectionneurs, et ce dès le premier tome. Ils ne les fréquentent pas forcément pour les mêmes raisons. En effet, Miyabi travaille dans un restaurant réputé pour ses vins, Shizuku y va pour s'instruire auprès de son amie, Sarah, mannequin, finit ses soirées de travail dans des bars à vin. Cette dernière a une cour et permet ainsi de faire rencontrer des personnages différents. Seul Issei Tomine reste isolé, un peu loin de ces lieux de dégustation, bien qu'il ait des contacts réguliers avec Sarah puisque cette dernière est sa demi-sœur.
La proximité organisationnelle apparaît également tout au long de l'histoire. Tout d'abord, Shizuku évolue dans une société de vente de boisson. D'abord spécialisé dans les bières, il est muté et devient un représentant du service Vin des bières Tayio. À partir de cet « avancement », il fait de Myaibi sa coéquipière en la recrutant. Les écoles d'œnologie qu'ils parcourent sont connues de tous les protagonistes et particulièrement du frère adoptif Issei. Tous les acteurs de cette histoire connaissent Yutaka Kanzaki (œnologue), étant la référence organisationnelle des pages de ce livre.
Ces proximités permettent une lisibilité plus aisée mais elles relèvent aussi d'une réalité microcosmique perceptible dans le monde vitivinicole. Des relations d'entraide ou de méprise apparaissent donc au sein d'un microcosme étant donné la proximité de acteurs. Ces relations spécifiques caractérisent les mondes tournés sur eux-mêmes. Les auteurs ont bien réussi à retranscrire ces ambiances. La solidarité est donc un facteur marquant de l'histoire à l'instar des observations possibles dans les régions viticoles.
B) Un pour tous, tous pour un ?
La solidarité est un facteur explicatif chez les sociologues. Les géographes ne s'en préoccupent peu, alors qu'il semblerait que la solidarité consolide les territoires. La solidarité a, selon les sociologues (Durkheim notamment), deux natures ; mécanique et organique (Deverre, 2004). La solidarité mécanique est liée à une organisation considérée comme archaïque. Elle relève principalement de l'entraide vitale où chaque participant à cette solidarité gagne quelque chose à être solidaire, selon des principes d'égalité. La solidarité organique est l'apanage des sociétés reconnaissant les individualités, les rôles et les fonctions de chacun comme formant un système de complémentarités. Durkheim la considère comme le propre des sociétés où le travail connaît de fortes divisions. Pour Zoll, la solidarité provient d'un glissement du communautarisme à une socialisation des groupes (Zoll, 1998). Pour lui, la solidarité se structure, elle est un construit que les sociétés doivent s'obliger. « En ce qui concerne l’institutionnalisation de la solidarité organique, on a peine à imaginer qu’elle puisse dériver de la solidarité mécanique institutionnalisée. Une telle institutionnalisation devrait suivre les lignes générales de la modernisation culturelle : être pluraliste et respecter l’individualisme. [...] Il faut s’attendre plutôt à un pluralisme d’organisations porteuses d’initiatives diverses de solidarité. Il semble exister en germe, mais sans doute faudra-t-il de nombreux mouvements sociaux pour le promouvoir et l’affermir » (Zoll, 1998). Les auteurs des Gouttes de Dieu décrivent assez bien les solidarités qui existent entre les acteurs du manga.
Une solidarité apparaît au fur et mesure de l'histoire, notamment autour du jeune Shizuku. Plusieurs personnes viennent l'aider dans sa quête comme par exemple Robert Doi, un marginal vivant dans un parc floral de la ville. Il lui apprend à découvrir ce qu'est un millésime, quels sont les arômes d'un vin, etc. Il fait mine de ne pas vouloir l'aider mais lui apporte une aide précieuse. Dans le tome 4, le lecteur apprend qu'il n'est autre que le juge du défi et surtout un ami du père décédé du héros. Une dame, mystérieuse aussi qui se fait appelée La Dame du Pin (en liaison avec le Château Le Pin, un grand cru bordelais) le soutient et lui offre des vins très chers pour qu'il puisse avoir les « valeurs gustatives de base ». Mais la solidarité ne concerne pas uniquement des acteurs.
À travers eux, existe une solidarité entre les régions viticoles. Un collègue de Shizuku ne jure que par les vins italiens. Il souhaite donc convertir le département vin qu'à des vins de ce pays. Shizuku pense qu'il est préférable d'allier les deux. Un duel est organisé. Le résultat de ce « combat » permet de montrer que les vins italiens ne sont pas forcément en concurrence avec les vins français puisqu'ils répondent à des exigences différentes des consommateurs. À partir de là, est envisagée une solidarité entre les deux régions puisque leurs vins n'offrent pas les mêmes caractéristiques. De ce constat, il est tout à fait possible d'envisager une véritable coordination, une complémentarité des régions viticoles européennes et même mondiales puisque les vins produits ne sont pas spécialement en concurrence mais plutôt complémentaires.
Qu'en est-il en réalité ? Une solidarité répondrait certainement à un manque d'organisation européenne au sein des espaces du vin. La solidarité revient donc à tolérer. Une tolérance spatiale émerge alors des mosaïques spatiales qui se basent sur des régions contrastées entre la réussite de certains et la déchéance d'autres. La tolérance spatiale est une notion qui permet de traduire l'intégration des espaces les plus marginaux dans un système global qui se base essentiellement sur l'acceptation des pratiques différentes sur un même espace (Boivin, 2008). Pour les espaces du vin, cela peut se traduire, par exemple, par la coopération ou encore par l'acceptation des espaces du vin qui ne trouvent pas de débouchés sur les marchés mondiaux et sont obligés de vendre au sein de l'espace local ou régional.
Pour tenter de conclure, l'œuvre « Les Gouttes de Dieu » raconte un monde proche de celui de la « réalité ». Les auteurs connaissent bien l'univers du vin et ce à tous les stades, de la production à la consommation. Bien évidemment, « les Gouttes de Dieu » reste une histoire, un monde imaginaire né dans l'esprit de l'écrivain et du dessinateur. Toutefois, ce manga laisse pensé que la culture bachique est présente dans la société du pays du Soleil Levant. Ils abordent le terroir aussi bien par son entrée physique (principalement lorsqu'ils évoquent les vins bourguignons) que par son aspect plus humain voire humaniste. L'homme est une caractéristique incontournable de la construction des terroirs. Tadashi Agi et Shu Okimoto plongent les lecteurs dans la poésie du vin, de sa fabrication mais surtout de sa dégustation. Le côté romantique de ce manga prouve une fois de plus l'encensement d'une société par la divine bouteille. Cependant, Les Gouttes de Dieu demeure une fiction. Le géographe peut se servir de certains éléments présents dans le livre comme le maillage relationnel qui existe dans le monde vinicole. Finalement, à regarder de près, cette bande dessinée japonaise a une double utilité pour la géographie : elle permet de retrouver des grandes généralités de l'organisation du monde du vin et elle offre aussi un regard autre notamment celui de l'espace imaginaire qui apparaît à l'esprit du dégustateur comme par exemple ces forêts vierges, ces collines rafraîchissante de l'Italie conçu par Yutaka Kanzaki.
Tous les tomes ne sont pas sortis encore, les lecteurs vont certainement découvrir de nouvelles visions du monde et du microcosme viticole. De nouveaux espaces et de nouveaux territoires vont se dessiner. Mais finalement, les géographes ne peuvent-ils pas trouver des sources d'études dans n'importe quelle œuvre, dessinée ou non, tant l'espace est une matrice indispensable à la société ?
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